Première partie du développement d’un commentaire du texte
tiré de Désert de Le Clézio :
Comment la description de la vieille ville
et de ses caractéristiques se met-elle en place dans ce passage ? Trois
procédés nous semblent impliqués dans cette mise en place : la scène, le
point de vue subjectif et la gradation négative. Tout d’abord, on remarque que
ce passage n’est pas une pure description de la ville. Les éléments descriptifs
sont introduits peu à peu au fil d’une scène. En effet, le narrateur nous
raconte, au présent, une action unique et continue, la traversée d’une partie
de la ville par Lalla. Les nombreux verbes d’action dont le sujet est Lalla
(« continue à marcher », « Lalla avance », « elle
tourne », « elle s’en va vite ») nous l’indiquent. Les premiers
éléments descriptifs apparaissent à partir de la troisième phrase. Une première
partie de la description se met ainsi en place dans les phrases suivantes
jusqu’au monologue intérieur « Où aller ? ». Puis d’autres
éléments apparaissent après des verbes d’action et des expressions qui
désignent les sentiments. Dans cette suite de la description, on remarque une
toponymie (« rue des Pistoles », « traverse de la
Charité ») qui situe avec une précision réaliste la progression de
l’héroïne. Les notations descriptives sont donc dispersées dans cette scène.
D’autre part, on constate que le narrateur ne décrit que ce voit Lalla. Le
récit adopte donc un point de vue subjectif. En effet, ce qui apparaît ce sont
d’abord les « fenêtres au ras du sol » puis « les volets (…)
tirés » et les « recoins pourris au bas des murs ». On suit donc
le regard de Lalla qui se déplace le long des rues qu’elle parcourt. Plus loin
dans le texte et dans la ville, le narrateur mentionne « l’étrange dôme
rose » que Lalla aperçoit « à travers le portail de pierre
grise ». La description progresse donc dans l’espace avec le regard de
l’héroïne. Il s’agit d’une description en mouvement. Enfin, on note que les
éléments descriptifs prennent au fur et à mesure une connotation négative qui
va crescendo. Les premiers éléments descriptifs sont plutôt neutres :
« il n’y a personne dans les rues à cette heure-là ». Puis on
rencontre des figures de style qui noircissent le tableau. On pourrait parler
d’une gradation négative de la description. Cela est dû, là aussi, au point de
vue subjectif. Les sentiments de Lalla font apparaître deux champs lexicaux,
celui de la mort et celui de la prison. On remarque en effet une métaphore,
« haleine de mort », qui désigne le souffle froid des soupiraux. On
trouve également le mot « tombeau » dans une comparaison à propos du
« dôme rose ». Par ailleurs, la description insiste sur l’aspect des
fenêtres qui sont « fermées par des grillages »,
« noires », « garnies de barreaux ». Le mot
« barreau » est même répété deux fois et l’on trouve cinq occurrences
du mot « fenêtres ». Cette insistance permet de donner à la ville un
aspect de plus en plus sombre, à la fois funèbre et carcéral. En somme, nous
avons ici affaire à une description en mouvement faite d’un point de vue
subjectif selon une gradation négative qui rend la ville de plus en plus
inquiétante.
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